samedi 17 mars 2012

Le Sel de la vie

"Ce livre plaide pour que nous sachions reconnaître non pas simplement une petite part ingénue d'enfance, mais ce grand terreau d'affects qui nous forge et continue sans cesse de nous forger, êtres sensibles que nous sommes. Pour que nous ne soyons pas simplement obnubilés par des buts à atteindre - des carrières à faire, des entreprises à commencer, des rentabilités à assurer - , en perdant de vue le "je" qui est en lice. Pour que nous sachions que, sous-tendant l'exploit sans cesse renouvelé de vivre, se trouve ce moteur profond qu'est la curiosité, le regard bienveillant en empathie ou critique ou constructif et constitutif que "je" porte sur le monde autour de lui.

Il faut se garder du temps pour constituer ce florilège intime de sensualité qui peut pourtant se partager, substrat fondamental de la "condition humaine". Quand on utilise cette expression et bien d'autres (pensons à la "vallée de larmes" qu'est censée être l'existence sur Terre !), on en vient toujours à l'expérience brûlante de la douleur et cruciale de la mort. Oui, mais c'est aussi cette capacité d'avoir du "goût", comme on dit en Bretagne, de l'appétence, du désir, cette capacité de sentir et de ressentir, d'être mû, ému, touché et de communiquer tout cela à des autres qui comprennent ce langage commun."

Françoise Héritier, Le Sel de la vie, Odile Jacob, pp. 84-85. 


On peut écouter Françoise Héritier dans Du jour au lendemain, avec Alain Veinstein.

St Germain de Confolens

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