samedi 25 mars 2017

# 72/313 - 77

Je me suis attardé le 24 février dernier sur le 5555, me voici maintenant occupé du 77. Il faut croire que j'ai une prédilection pour les multiples de 11. Le sept étant par ailleurs le nombre à la base de ce projet, il était presque inévitable que je croise le chemin du 77.

Il faut tout d'abord en revenir au tableau de Antoine-Jean Gros :

Baron Antoine-Jean GROS
Napoléon sur le champ de bataille d'Eylau (9 février 1807)
1808, Musée du Louvre
Ce tableau, œuvre de commande, réalisé dans l'hiver 1808 après que le baron Gros ait gagné le concours organisé par Vivant Denon, est exposé précisément dans l'aile Denon, salle 77 (salle Mollien). "Malgré le blanc de la neige, écrit Jean-Paul Kauffmann, - ou plutôt à cause de ce blanc - cette peinture est noire. Gros, en voilà un qui n'a pas transigé avec le sujet qu'on lui a imposé. Sa peinture suscite le malaise comme d'ailleurs tout ce qui touche à Eylau" (Outre-Terre, p. 29). La notice du Louvre  précise que les espions de la police suspectèrent ce tableau de rendre la guerre impopulaire : "Toutefois, Napoléon apprécia l’œuvre et lors de la distribution des récompenses aux artistes, il remit sa propre croix de la Légion d'honneur au peintre."

Le second 77 n'a rien à voir en principe avec Napoléon, Gros et la peinture. Il intervient dans une triste nouvelle tombée ce dimanche soir du 19 mars :


Sachant que 1967 fait l'objet d'une fiction chaque dimanche de cette année 2017, un demi-siècle plus tard, alors je ne pouvais être indifférent à l'annonce de la mort du vainqueur du Tour cette année-là. Mais que, de plus, il soit âgé de 77 ans me laissa rêveur. En lisant ensuite la biographie de ce coureur atypique par sa personnalité, je lui trouvai comme un air de famille avec l'Empereur : Pingeon - Napoléon, même combat... "Il incarnait le vélo romantique, par ses chevauchées et aussi ses défaillances", a commenté Christian Prudhomme, directeur du Tour de France. "Ce coureur de caractère fort, capable de coups de colère, au moral sans doute friable avait des qualités exceptionnelles", a-t-il également estimé. (Source).
Ses chevauchées... Le cycliste est comme un chevalier à la recherche de la tunique de soleil, un preux toujours dans l’épreuve ; dans l'article on le désigne même comme un pur-sang en ajoutant ses mensurations (1,82 m pour 72 kg). Son tour de France 1967, il l'avait en partie gagné grâce à une échappée solitaire à... Jambes, en Belgique (lui qu'on surnommait aussi l’Échassier à cause de la longueur des dites jambes).
"Capable de coups de tête, sujets aux états d'âme, il annonça plusieurs fois son retrait (Paris-Nice et Dauphiné 1966). Il alla jusqu'à jeter pendant la course son vélo dans le ravin au désespoir de Gaston Plaud, son directeur sportif de Peugeot, jurant de redevenir plombier-zingueur, son métier d'origine. Car cet homme secret et timide ne faisait rien comme les autres."

Enfin, cette même soirée, écrivant la prochaine fiction 1967, programmée pour le dimanche 26 mars, et devant se dérouler au Vietnam, je me suis reporté pour la documentation au Hors-série de Géo-Histoire consacrée à cette guerre, et ce faisant, je suis tombé en arrêt devant cette page :


Wikipedia : "Le siège de Khe Sanh est une bataille de la guerre du Viêt Nam qui opposa l'armée américaine à l'Armée populaire vietnamienne et les troupes du Front national de libération du Sud Viêt Nam (Viêt Cong). Elle se déroula au début de 1968, durant la fameuse offensive du Tết. Elle commença le 21 janvier, et dura 77 jours. Conclue par une victoire américaine, elle n'eut cependant pas de réelle implication stratégique."

77 jours. Du 21 janvier au 8 avril 1968. Je m'avise là aussi, en parcourant la notice, que cette bataille de Khe Sanh n'était pas sans ressembler à la bataille d'Eylau. Certes, comme Napoléon, les Américains pouvaient la considérer comme une victoire :  après avoir fait pleuvoir plusieurs milliers de tonnes de bombes sur les collines autour de Khe Sanh, l'armée américaine avait estimé qu'au moins 13 000 Vietnamiens avaient été tués (contre 200 tués et 1600 blessés dans le camp U.S.), et le général Westmoreland, commandant du MACV, avait affirmé que Khe Sanh avait été un « Dien Bien Phu à l'envers ». Mais d'autres considèrent que "cette bataille a été une victoire stratégique vietnamienne, car elle leur a permis de fixer une grande quantité de troupes américaines loin des villes où se déroulait simultanément l'offensive du Têt. Ce qui a bel et bien servi les desseins vietnamiens. Le but de la bataille n'aurait donc pas été de battre l'armée américaine, mais de retenir troupes matériel et moyens, chose que les Vietnamiens ont réussi à faire. " Les Vietnamiens, comme les Russes à Eylau (ce qui ne manque pas de surprendre au départ Jean-Paul Kauffmann), revendiquent donc aussi la victoire.
A noter que Bruce Springsteen a fait allusion à la bataille dans son tube Born in the U.S.A. :


I had a brother at Khe Sahn
J'avais un frère à Khe Sahn
Fighting off the Viet Cong
Qui combattait les Viet Cong
They're still there, he's all gone
Ils sont encore là, il a disparu 
 ( A 2: 00, sur la vidéo)

Bon, et pour conclure ce triptyque 77, une dernière remarque : c'est le 15 novembre 1977 que Pascal Quignard enregistra la Cassandre de Lycophron sur France-Culture.

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